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Travaux irréguliers : le maire dispose d’un délai de 6 ans pour ordonner la mise en conformité prévue à l’article L.481-1 du Code de l’urbanisme.

Par un avis du 24 juillet 2025, le Conseil d’État a apporté des précisions bienvenues sur le délai durant lequel le maire peut mettre en demeure sous astreinte financière un contrevenant de réaliser les opérations nécessaires à la mise en conformité de sa construction ou de ses travaux.

QU’EST CE QUE LA MISE EN DEMEURE SOUS ASTREINTE FINANCIÈRE ?

La mise en demeure sous astreinte financière (article L.481-1 du Code de l’urbanisme) permet au maire d’exiger d’un contrevenant la régularisation administrative de la situation.

Le maire peut ainsi solliciter la mise en œuvre des « opérations nécessaires à la mise en conformité », pouvant aller jusqu’à la démolition de la construction.

Au regard de cette finalité, le législateur a entouré ce pouvoir du maire de garanties procédurales :

  • le constat préalable d’une infraction pénale par un procès-verbal dressé en application de l’article L.480-1 du Code de l’urbanisme ;
  • l’envoi d’un courrier préalable permettant au contrevenant de faire valoir ses observations.

Aucun texte ne précise cependant le délai durant lequel le maire peut mettre en demeure sous astreinte financière un contrevenant.

SOUS QUEL DÉLAI LE MAIRE PEUT AGIR ?

C’est à cette question que le Conseil d’État a répondu dans un avis n°503768 du 24 juillet 2025.

La Haute juridiction a estimé :

« En subordonnant l’exercice des pouvoirs dont les articles L. 481-1 et suivants du code de l’urbanisme investissent l’autorité administrative compétente au constat préalable d’une infraction pénale par un procès-verbal dressé en application de l’article L. 480-1 du même code, le législateur, dont il résulte des travaux préparatoires qu’il a entendu doter cette autorité de moyens propres d’action en présence d’infractions commises en matière d’urbanisme, sans préjudice de l’engagement de poursuites pénales à l’encontre de leurs auteurs, doit être regardé comme ayant exclu que ces pouvoirs puissent être mis en œuvre pour remédier à une méconnaissance des règles relatives à l’utilisation des sols ou des prescriptions d’une autorisation d’urbanisme au-delà du délai de prescription de l’action publique.« 

Autrement dit, s’agissant de faits qualifiables de délits et sous réserve de l’intervention d’actes interruptifs de la prescription, ce délai est de six années révolues à compter du jour où l’infraction a été commise, c’est-à-dire, « en règle générale, de l’achèvement des travaux« .

LE CAS DES TRAVAUX SUCCESSIVEMENT RÉALISÉS DE MANIÈRE IRRÉGULIÈRE : QU’EN EST-IL ?

Le Conseil d’État a également répondu à cette question dans son avis rendu le 24 juillet 2025 :

« Dans le cas où des travaux ont été successivement réalisés de façon irrégulière, seuls les travaux à l’égard desquels l’action publique n’est pas prescrite peuvent ainsi donner lieu à la mise en demeure prévue par l’article L. 481-1 du code de l’urbanisme. Pour apprécier si ces travaux peuvent faire l’objet d’une demande d’autorisation ou d’une déclaration préalable visant à leur régularisation, qui doit alors porter sur l’ensemble de la construction, l’autorité administrative compétente doit notamment tenir compte de l’application des dispositions de l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme, qui prévoient que, lorsqu’une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou la décision d’opposition à déclaration préalable ne peut être fondé sur l’irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l’urbanisme, sous réserve, notamment, que cette construction n’ait pas été réalisée sans qu’aucun permis de construire n’ait été obtenu alors que celui-ci était requis. Si les travaux ne peuvent être ainsi régularisés, les opérations nécessaires à la mise en conformité, y compris, le cas échéant, les démolitions qu’elle impose, ne peuvent porter que sur ces travaux. ».

En d’autres termes, lorsque des travaux ont été successivement réalisés de manière irrégulière, une analyse en deux temps s’impose :

  • d’une part, déterminer si une régularisation de l’ensemble des travaux est possible.

Conformément à l’article L.421-9 du Code de l’urbanisme, ne sont concernés que les travaux datant de moins de 10 ans ou ceux réalisés, même il y a plus de 10 ans, sans qu’aucun permis de construire n’ait été obtenu alors que celui-ci était requis.

  • d’autre part, si aucune régularisation n’est possible, déterminer les opérations nécessaires à la mise en conformité des travaux ou si la démolition est requise.

Dans ce dernier cas, au-delà d’un délai de 6 ans à compter de l’achèvement des travaux, aucune mise en demeure ne peut être valablement adressée à un contrevenant.

En résumé, l’avis du Conseil d’État apporte une clarification bienvenue en comblant le silence du législateur sur la durée pendant laquelle le maire peut exercer son pouvoir de mise en demeure prévu à l’article L.481-1 du Code de l’urbanisme.